Sur le premier panneau de votre bureau de vote, le plus à gauche, figurera cette affiche. Que nous raconte-t-elle de l’offre trotskyste ?
De l’image, du texte, des couleurs, des logos, du contexte… Dans le champ psychologique, une affiche politique revêt quantité de significations. A chacun d’en interpréter le message, en fonction de ses sentiments et intuitions propres.
Ainsi ce portrait de Nathalie Arthaud peut nous rappeler… Mademoiselle Zaouche l’institutrice du CE2, ou tante Rose qui est restée vieille fille, ou bien Pilar notre voisine militante ultra féministe qui abhorre maquillage et accessoires… On peut penser à Afflelou et sa deuxième paire de lunettes gratuite, à Zara, à Franck Provost… Et on peut la trouver jolie, Nathalie, ou laide, selon notre souvenir de visages ressemblants croisés par le passé.
Mais en toute hypothèse, c’est-à-dire au-delà des équations personnelles, ce que Lutte Ouvrière, le parti politique de Nathalie Arthaud, désire en proposant cette affiche, c’est déterminer tout le monde à voter pour sa candidate. Et donc, il s’agit de trouver un message commun à tout l’électorat.
Or l’électorat de Lutte Ouvrière, parti trotskyste partisan de la révolution communiste dans le monde entier, ce devrait être les prolétaires.
Dans notre pays, au XXIème siècle, les « prolétaires », ce sont les ouvriers, les paysans, les employés de bureau, les immigrés affectés aux travaux les plus ingrats.
Problème : ceux-là ne votent pas pour les trotskystes.
Les rares électeurs de Lutte Ouvrière ( O,5 % ) sont étudiants, intellectuels, fonctionnaires.
Ce désastreux constat pourrait-il amener le Parti à changer de discours ?
Mais non, l’explication officielle est que Le Pen et Zemmour agitent les peurs, et leur abjecte démagogie trompe les masses.
Cette analyse révèle un extraordinaire mépris des « travailleurs ». Trop c… pour comprendre que les fachos les baladent, n’est-ce-pas ?
En revanche, eux, l’avant-garde du prolétariat, sont conscients, lucides…
Qu’un macron méprise le peuple, on peut au moins le comprendre : son électorat est ailleurs.
Mais un parti qui méprise son propre électorat…
Bon. L’affiche va donc s’adresser aux travailleurs.
Un joli tampon en surimpression indique, en grandes lettres : « le camp des travailleurs ».
Comme un label.
Comme un certificat d’authenticité.
Ainsi les travailleurs sont invités à rejoindre le club.
Mais…
Le camp des travailleurs… qui peut proposer une formule plus répulsive ?
Qui a envie d’être « un travailleur » ?
Quand vous et moi avons travaillé au SMIC pour payer nos vacances ou démarrer dans la vie, nous définissions-nous comme des travailleurs ? Que voulons nous tous, sinon ne jamais être classés dans cette catégorie désespérante ?
Le manque de glamour confine ici à un manque absolu de psychologie.
Et ce n’est pas tout.
Qui a envie d’être dans « un camp » ?
S’il existe un camp des gagnants au loto, on veut en être. Un camp pour les plus beaux(belles) gosses du monde, on veut en être. Le camp des Loges à la rigueur, pour les fans de foot.
Mais le camp des terrassiers, des garçons de salle à l’hôpital, des ouvriers agricoles et des laveurs de carreaux, qui ? qui veut en être ? qui ne détesterait qu’on l’y enferme ?
Le camp des travailleurs… c’est le slogan rédhibitoire.
Il illustre la manière stupéfiante de parler au peuple qu’ont adopté, depuis 50 années qu’ils existent, les trotskystes français.
Rien d’étonnant à ce que leur étiage électoral ne dépasse jamais 0,5 %.
Cela étant, il existe une jouissance dans la marginalité.
Les trotskystes aiment être seuls contre tous.
Dimanche il sera facile de les aider à le rester !